Trafic... Mais de quoi? (PV Emerson)

Dix-huit heures. Emerson parcourait le centre-ville, à la recherche d'un emploi, ses écouteurs sur les oreilles, déversant en boucle des morceaux plutôt pop-rock, comme elle les aimait. La musique était pour elle un accompagnement de tous les jours, la faisant souvent revenir à des périodes particulières de sa vie. Sa vie ... Emerson n'avait pas eu une existence si facile que ça. Elle avait beau être vampire, avoir tous les pouvoirs possibles et inimaginables, elle n'avait pas toujours été heureuse. Seulement, depuis 17 ans ... Elle existait. Elle existait, malgré que ce ne soit pas sous le nom de Gloria. Elle aurait préféré garder son prénom, mais celui-ci était largement démodé, surtout aux Etats-Unis, et le jeune fille avait opté pour un prénom spécial et moderne. Elle était plutôt fière de sa trouvaille, et depuis ce jour, elle se sentait vivre.

Em' secoua la tête, tentant de faire disparaître les souvenirs qui l'envahissaient. Elle ne souhaitait pas repenser à tout cela, toutes ces années difficiles où elle avait cherché qui elle était. Elle s'arrêta un instant, et avisant, un banc, s'assit. Elle sorti de son sac un petit carnet et un crayon, et commença à dessiner, lorsqu'un homme retint son attention. De son allure se dégageait un charme évident. Il était plutôt beau, pour un humain du moins. Ses yeux noirs farfouillaient la foule à la recherche de quelqu'un, et Emerson eut soudain envie de le dessiner, sans savoir pourquoi. Après tout, l'inspiration vient de tout et n'importe quoi. Alors, elle observa. Ses yeux bleus restaient fixés sur sa cible, tandis que sa main traçait sur le papier de complexes arabesques. C'était d'une facilité déconcertante de dessiner lorsqu'on était vampire : déjà qu'elle était douée à la base, ses facultés étaient décuplées par son puissant cerveau.Elle observait toujours, lorsque l'homme que l'inconnu cherchait se présenta. Focalisant son regard sur ce qui se passait, Emerson aperçut un sachet ... Un sachet de poudre blanche. Elle soupira. Pas besoin d'être un p'tit génie pour savoir que c'était de la drogue ! Rangeant son matériel à dessin, et le portrait fini du mystérieux délinquant, la vampire se dirigea d'un pas rapide vers l'homme. Celui-ci commençait déjà à se détourner, et elle dut accélèrer le pas.

EMERSON : Excusez-moi !

L'homme se retourna, interloqué. Lorsqu'il aperçut Emerson, son visage se fendit d'un sourire. Ainsi, il aimait les femmes ... Pas étonnant de la part d'un homme comme lui. Emerson grimaça. Elle ne savait pas pourquoi elle l'avait interpellé, et il ne semblait pas homme à se laisser faire la morale.

EMERSON : Je peux savoir ce qu'il y avait dans la poche s'il vous plaît ?

EDWARD:Non, tout simplement parce que ce sont mes affaires, et pas les votres, jolie demoiselle.

Bah voyons ! Elle sourit, à l'idée que cet homme arrogant et prétentieux, elle pourrait n'en faire qu'une bouchée. Une bouchée ... Le goût du sang humain, depuis si longtemps absent de sa bouche ... Son instinct de prédatrice prenait le dessus, l'emportant sur sa raison. Elle fit un pas involontaire vers l'inconnu, se rapprochant encore de cette délicieuse odeur qui en émanait. Si elle pouvait planter ses crocs dans la peau tendre de cet homme, ne serait-ce qu'une fois ... Emerson sursauta, et porta la main à son front. Elle ne s'était pas nourrie depuis trop longtemps, et sa gorge la brûlait avec toutes les délicieuses odeurs qui l'entouraient. Pourtant, les trois siècles d'abstinence qu'elle avait passé, ne goûtant le liquide rouge et doux qu'en cas d'absolue nécessité avait renforcé sa résistance à l'attrait de l'odeur humaine. Mais trois siècle, ce n'était pas suffisant pour oublier que l'on était un vampire immortel et assoiffé de sang. La jeune fille grimaça, et reporta son attention sur l'homme qui lui faisait face. Prenant soudainement conscience des deux pas qui la séparaient du mystérieux brun, Emerson les franchit, et leva sa tête jusqu'à ce que sa bouche touche l'oreille de son interlocuteur.

EMERSON : Et si je te disais que je suis intéressée ?

Menteuse. Encore une fois. Il n'y avait rien qu'Emerson haïssait plus que la drogue. Elle avait vu tant de choses affreuses que celle-ci provoquaient, qu'on aurait pu remplir un livre entier avec. Emerson n'était ni agent de la CIA, ni flic, ni quoique ce soit s'en rapprochant. Mais elle avait trois siècles d'expériences, et tenait à faire profiter le maximum de personnes de ce qu'elle avait appris. Entre autre que le mot "drogue" voulait dire "tuer". Elle savait pertinemment que l'homme s'en moquerait, et pourtant, son instinct la pousser à faire ça. Pourquoi ? Aucune idée. Elle vivait vraiment dans une ville mortelle : tant de meurtres, tant de drogues, ... Et elle ne pouvait rien n'y faire. Le désespoir l'envahissait tandis qu'elle attendait la réponse de l'homme, espérant qu'il se laisserait tromper et dévoilerait son petit manège à la jeune fille.

{Désolée du retard ... Vive les devoirs --'}

EDWARD : Tu es intéressée par moi, ou par ma poche ? Sachant que je ne possède strictement rien, à part un peu d’argent et moi-même.

Là, elle était bloquée, et pas qu'un peu. Elle répondait quoi maintenant ? Elle ne l'avait vraiment pas joué fine, interpellant ainsi un inconnu, simplement parce qu'il faisait, elle le savait pertinemment, un trafic de drogue. Il ne lui restait plus qu'à s'en aller. Elle se recula un peu, jetant un regard peu amène à l'homme. Elle ne voulait pourtant pas partir, cet homme qui lui faisait face l'intéressait ... Elle jeta un coup d'oeil vers la poche. De toute façon, elle ne pourrait rien faire contre lui, le client fortuné ayant déjà emporté sa petite poudre blanche adorée. Elle se détourna, et recommença à marcher vers le banc sur lequel elle était assise. Elle entendit les pas de l'inconnu, s'éloignant dans la direction opposée, sans aucun doute heureux d'être sorti victorieux de cette petite bataille. Brusquement elle se retourna. 3 siècles qu'elle vivait. Pas plus de 20 ans que lui vivait. Elle avait toujours été sage, un modèle pour les autres. Il avait toujours été un petit démon, l'homme qui portait l'étiquette destinée aux enfants "Ne t'approches pas !", Emerson le devinait. Elle avait envie de voir ce que ça faisait de porter cette étiquette. Après tout, elle avait l"éternité devant elle, elle pourrait se racheter une conduite bien assez tôt !

EMERSON : Attendez !

Elle se lança derrière lui, le rattrapant aisèment. Arrivée à sa hauteur, elle tapota son épaule, afin de signaler sa présence. Quoiqu'elle avait été tellement bruyante qu'elle doutait qu'il ne l'ai pas entendu, m'enfin bon, on sait jamais ... Sa décision était prise, elle allait le suivre, quoiqu'il en dise. Dans une ville de mauvais garçon, qu'est ce que ça pouvait bien faire qu'il y en ait un de plus ou un de moins de toute façon ? Bizarrement, elle se sentait libérée par cette brusque décision, fruit de son subconscient.

EMERSON : Je vous accompagne, je veux voir comment vous vivez. Et non, je ne suis pas bizarre, ...

EDWARD: Tout compte fait, vous me suivez alors... Vous ne serez pas déçue ma jolie.

Folie, douce folie. Sa confiance se trouva ébranlée de ce que elle était en train de faire. Elle savait parfaitement ne rien risquer : celui qui s'en prendrait à elle le regretterait sans même avoir eu le temps de se rendre compte de ce qui lui arrivait. Mais malgré tout, elle se demandait si ce qu'elle faisait était vraiment raisonnable. Oh, et puis m*rde ! Qu'est-ce qu'elle en avait à faire d'être raisonnable ou pas ? Elle avais l'éternité devant elle, et elle voulait expérimenter tout ce qu'elle pouvait. Elle n'avait qu'à prétendre être ouverte d'esprit, ce serait une bonne excuse à son comportement. L'inconnu lui faisant face interrompit les pensées, pour la plupart stupide, qui avait envahi son esprit.

EDWARD: Vous voulez donc savoir comment je vis... Intéressant... Puis-je savoir votre beau prénom?

Oui, elle voulait savoir comment il vivait. Savoir ce que ça faisait d'être un délinquant qui n'en avait rien à foutre de ce qu'on pensait de lui.

EMERSON : Emerson Johnson. Et vous ?

Elle lui avait servi son mensonge habituel. Emerson Johnson ... Des fois, ça faisait bizarre, ce nom sortant de ma bouche, qui n'était pas le mien. Parfois, elle se sentait Gloria Johnson, bien qu'elle y aille renoncé depuis bien longtemps. Ce nom déclenchait en elle une vague de frisson, et de souffrance, au souvenir du passé qui lui avait été enlevé si tôt. Mais aujourd'hui, pour la première fois, aucune trace de Gloria, la sérieuse, la mature, la posée, ne subsistait. Elle était devenue Emerson, artiste, rebelle pour la première fois de sa vie. Et malgré l'étrange sentiment de déraisonnable et de peur qui l'habitait, j'étais fière de ce que elle était.

EMERSON : A moins que vous ne désiriez faire durer le suspense, pour ne pas vous compromettre.

Elle avait lancé cette réplique sur un ton ironique. Il en avait rien à faire qu'elle sache son nom ou pas, elle en avait conscience. D'ailleurs, New York entier devait le connaître. Il était homme à profiter de son business pour se tailler sa petite renommée. Il la regardait d'un air curieux, comme si il l'avait déjà rencontré quelque part, elle et ses feuilles de papier. Soudainement, elle se pétrifia sur place. Le regard de l'homme la vrillait, droit dans les yeux. Ses yeux bleus, d'un bleu éléctrique. Caractéristique à son espèce. Immédiatement, elle inspecta son visage, et ce qu'elle y trouva la détendit : il avait sans doute rencontré quelqu'un de son espèce, sans pour autant savoir ce qu'elle était réellement. Son visage se radoucit, et les quelques rides souvieuse qui étaient sans doute apparut sur son front disparurent. Elle se sentait étrangement sereine et reposée, suivant l'homme docilement. Elle voulait apprendre. Apprendre comment être un délinquant.

"Folie", se murmura-t-elle à elle-même.

Ils avaient marché à travers New-York, l'inconnu continuant de refuser de décliner son identité. Ah oui ? La colère bouillonnait légèrement en Emerson, qui haïssait qu'on ignore ses questions, comme si de rien était. Elle n'était pas là pour être traitée comme une esclave, mais pour apprendre. C'était deux choses différentes. Les avait-il compris ? Un instant, elle envisagea de tirer délicatement les cheveux de l'homme et de mordre, peu profondèment, dans son cou. Un avertissement, simplement ... Elle se ressaisit. Elle ne devait en rien laisser son identité être découverte. Sa véritable nature s'entend. Soudain, un problème se posa à elle. Quand chasserait-elle ? Presque aussitôt, elle écarta cette question de son esprit d'un revers de la main. Il lui laisserait bien une heure par jour à elle, elle n'aurait qu'à y aller durant ce temps-là. Elle se reconcentra sur le paysage monotone qui défilait sous ses yeux. Gratte-ciel, restaurant, baraque décharnée, gratte-ciel, restaurant, et ainsi de suite. Elle soupira, impatiente, jusqu'à ce qu'ils bifurquent en direction d'une maison à l'apparence plutôt entretenue. L'homme sonna, et un majordome les fit entrer, appelant l'inconnu "Maître". Elle avait l'impression d'être revenue en Russie, où tout le monde l'appelait Petite Maîtresse, et son père, "Maître". Ses épaules se contractèrent à ce souvenir : dans quoi s'était-elle fourrée ?!

EDWARD: Excusez moi, belle demoiselle. Je ne voulais pas faire durer le plaisir et puis, je n'ai
rien à cacher. Je me nome Edward West, je ne suis pas de famille
royale, je n'ai pas de parents riches, mais je vis ici.

Edward West. Edward était plutôt ... Ancien comme prénom. Elle haussa les épaules, indifférente à cette étymologie.

EMERSON : Mmmh, enchantée.

L'HOMME: Bien le bonjour maître, bienvenue, gente damoiselle. Permettez moi de vous débarasser.

Edward, face à elle, se débarrassa gracieusement de sa veste et son écharpe, et les déposa soigneusement dans les bras tendus de son majordome. Il lança un coup d'oeil appuyé à Emerson, qui comprit immédiatement qu'elle devait faire de même. Rapide, elle enleva sa petite veste en cuir, et son écharpe, et les déposa dans les bras toujours tendus du majordome. Elle le regarda alors s'éloigner, son butin en main.

EMERSON : Et maintenant ?